A lire extraits du recueil : "Le front contre le ciel"

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Ce recueil a obtenu le 2eme prix de Tavel 2009 et le 3eme prix de la ville D'arles 2009, publié dans la revue Tarabuste :

 

 

D’où vient ce bois noyé

Qui s’est échoué sur le sable ?

D’un bateau naufragé

D’un radeau du siècle dernier

Ou d’un rêve australien ?

 

 

Et ce bijou avec une perle bleue

Qui reflète le haut ciel

Est-il le tien ou le cœur durci

D’un farfadet qui n’a plus envie de danser

Et qui a mis sa main sur sa bouche ?

 

D’où viennent ce bois noyé

Et ce bijou ciselé ?

 

De notre atelier abandonné ?

 

Je suis au bout de cette plage immense

Où la falaise avance jusqu’à la mer

Et coupe le monde en deux

 

 

 

 

Que reste-t-il de notre beauté ?

Cette parole écrite sur le mur de la chambre

Sur la plage ces rochers qui regardent l’horizon

Toute la journée avant de s’endormir

Dans le creux de leur ombre

 

Que reste-t-il de notre été ?

Un drap défait dont les vagues fossilisées

Avancent sous mes pieds

 

 

 

Une nuée de mouettes m’encercle

 

Leurs ombres me percutent

 

Regarde leurs cris

Qui forment un buisson épineux

Regarde le claquement

De leurs ailes qui froissent le ciel

Regarde le bruissement de mon cœur

Qui roule dans la mer

 

 

M’entends-tu ?

 

M’entends-tu ?

 

La rumeur de l’arrière-ville

M’emplit le cœur de sable mouvant

 

Au bord de l’horizon

Des petites lumières tremblotent

Puis tombent au-delà du monde

Est-ce la fin ou le commencement ?

 

 

 

Des mots

Des mots

Des mots

Il ne me reste que des mots

Dont la pensée s’est retirée

Loin à marée basse

 

Laissant des corps échoués

Coquillages crustacés carapaces

Objets sans désir dont l’énergie

A été emporté en pleine mer

 

Assis à côté des voiliers

A main nue je mélange dans le bassin

Le ciel qui s’est assoupi

 

Au creux de ma paume

Dans l’eau que j’ai retenue

Les nuages se reposent

 

Que ta main revienne

Posée sur la mienne

Qu’elle s’enferre

Qu’elle m’étreigne

Qu’elle me serre

Jusqu’à ce que je saigne

 

Les premières gouttes de pluie

Crépitent sur la mer

Et une à une me transpercent

 

 

Je t’aimais comme on chante

Sans arrière-pensées

 

Il est minuit

 

L’obscurité assomme les mots et les formes

J’observe les lambeaux de chair

Qui hantent la jetée et le débarcadère

Ils s’approchent de moi

 

Et je vois une lumière au-dessus de l’eau

Celle de mon esprit qui vacille ?

 

 

Avec ce bateau qui s’est couché

Sur ma poitrine

Sont venus les embruns des clochers

D’une mer asséchée

Qui ne reflète plus le ciel

 

Avec ce bateau

Qui s’est couché sur ma poitrine

Etrave sur mon sternum

Coque le long de mes côtes

Et mat à hauteur d’homme

Je partirai un matin calme

J’arracherai l’ancre

Qui emportera le port

J’enflammerai la mer d’huile

Qui reflète toujours le ciel

 

Avec seulement deux pierres à sel

Je m’endormirai les poches pleines

D’étincelles pour semer demain

Des paroles en l’air qui se fixeront

En étoiles rebelles aussi fragiles

Que la vie humaine

 

Les visages s’effacent

Déchirés grattés ou recouverts

Derrière les humeurs mécaniques

Et je ne vois plus le tien

Aux courbes penseuses

Qui surgissait entre les voix

Si clair entre deux eaux spumeuses

 

Roc primitif

Que la mer a essayé de polir

Mer de Sisyphe

Dont les roses ont caressé le souvenir

Roc indomptable

Qui ne veut pas finir

En étendue de sable

 

Tu es mort

La mer qui était ton rêve

Sera notre terre

 

Dieu

Tu es mort

Les cris des oiseaux

Font se dresser les vagues

La crête brule d’un duvet si blanc

Que l’ombre immolée sombre

Dans les sentiments sous-marins

 

Chaque matin la mer soupire et se soulève

Dresse un pont vers l’avenir

Mon ombre d’hier m’abandonne

S’efface du cœur de la pierre

Mes pieds nus ne laissent plus de traces

Ils effleurent la clarté de l’espace

Où brille la fleur de sel

 

Mes poumons dénudés respirent

Les désirs vermeils et les sillages diurnes

Et mon front réchauffé aux rayons nouveaux

S’éveillent à l’onde sensuelle

 

La mer enfle

Prend des airs de terre

Danse à la cadence des lamentations divines

Qui noircissent l’humeur

Le bleu devient amer

Et les yeux respirent le sel

Humer les nuages jusqu’à en être soulé

Et l’amer bouge sans s’arrêter

Escalade les montagnes qui roulent

Dans la vallée jusqu’au port de cocagne

 

De sa profonde épaisseur

Nait un suprême murmure

Qui meurt sur le sable parfait

Et qui fait tendre l’oreille

Aux vibrations iodées

Je bois cette petite voix fêlée

 

Mais qui règne ?

L’autel est déjà dans les bas-fonds de l’océan

Recouvert de corail squelettique

En guise de funérailles

 

Qui se baignera ?

Nos corps mal habités

Emprunt d’un destin fabriqué

Nos esprits encore malhabiles

Qui errent près des écueils

Ou nos épaules qui portent déjà l’aube

Dont l’enfance fait signe à nos aïeuls

Pour gouter les senteurs qui bruissent à l’horizon

 

Il n’y aura plus de maison

Plus d’idées fixes

Mais un mouvement perpétuel

Qui brisera l’onyx

 

Que les gouvernails sous les pluies acides

Rouillent et se délitent !

 

Que les flots maritimes

Emportent toutes les victimes

Sur le dos des hippocampes dauphins et baleines

Jusqu’aux fjords noirs

Qui tiennent l’aube à bout de bras !

 

 

 

 

 

 

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